« Les hommes révoltés »
« Les hommes révoltés »
Entre connivence intellectuelle et engagement libertaire,
les liens entre Hultén et Tinguely dans le contexte
de l'anarchisme culturel des années 1950
Pierre Ruault
Depuis leur rencontre en 1954 à Paris, une amitié singulière s’est nouée entre l’artiste suisse Jean Tinguely (1925-1991) et le commissaire d’exposition suédois Pontus Hultén (1924-2006) [fig. 1]1 . Nourris par les idéaux libertaires qu’ils partagent, tous deux ont cherché à remettre en cause les normes esthétiques et politiques de leur temps, élaborant ensemble une forme de révolte qui débordait les cadres de l’art pour investir ceux de la société2 . De texte en texte, se tisse entre eux une relation dynamique et singulière : les écrits de Hultén se construisent comme une suite de fragments en écho, reprenant parfois les mêmes formulations, approfondissant les mêmes intuitions. Inversement, l’œuvre de Tinguely devient l’un des axes majeurs de la pensée critique et curatoriale du Suédois3 .
Au moment de leur rencontre, l’Europe se trouvait divisée en deux blocs distincts : à l’Ouest, le modèle démocratique et capitaliste ; à l’Est, le communisme d’État. Cette bipolarisation du monde occidental entre deux forces idéologiques antagonistes a provoqué un profond bouleversement dans le champ de la pensée et de la création, posant des nouvelles conditions pour l’action politique et culturelle et reléguant à la marge un certain nombre de référentiels. Pris en tenaille entre les deux discours idéologiques, les différents courants libertaires voient alors leur influence se réduire comme peau de chagrin. Comme le souligne l’historien Gaetano Manfredonia, « [a]u cours des années 1950, il est donc possible de parler de l’existence d’une véritable crise identitaire d’une ampleur sans précédent qui affecte le mouvement dans son ensemble4 ».
Afin d’échapper à cet isolement, l’anarchisme est contraint d’évoluer vers de nouvelles formes d’engagement, plus souterraines, en s’éloignant de la sphère politique traditionnelle. De ce fait, l’anarchisme prend part aux débats intellectuels européens en argumentant en faveur d’une « troisième voie », censée esquisser une nouvelle position politique et idéologique5 . Selon l’historien de l’art Jacopo Galimberti, les débats majeurs de cette époque tournaient autour des tensions entre liberté individuelle, formes d’individualisme et aspirations collectivistes6.
Le pensée libertaire représente donc une alternative forte pour une nouvelle jeunesse européenne qui cherche à adopter une posture radicale. Elle apparaît alors à la fois comme une nouvelle utopie politique et comme une manière de vivre, une éthique de l’existence, qui a largement infusé les esprits sans jamais pour autant s’imposer comme une idéologie constituée. Durant les années 1950, l’anarchisme prend surtout une tournure culturelle, imprégnant la vie artistique et orientant de nombreuses aspirations intellectuelles. Ce ne sont plus les militants, mais les artistes, écrivains, cinéastes, chanteurs, qui maintiennent et font vivre la flamme libertaire7 . C’est cet ensemble mouvant, à la fois critique et créatif, que l’on peut désigner comme un « anarchisme culturel ».
La collaboration entre Jean Tinguely et Pontus Hultén s’inscrit pleinement dans l’effervescence libertaire qui traverse le champ artistique de l’après-guerre. Si l’influence des grands penseurs de l’anarchisme sur leur travail est aujourd’hui bien documentée, le contexte culturel et intellectuel spécifique des années 1950, dans lequel se sont forgées leurs sensibilités, demeure peu exploré8. Cet essai entend montrer en quoi la résurgence des idées anarchistes dans les sphères intellectuelles et artistiques de cette décennie constitue une clé de lecture essentielle pour comprendre certains aspects du discours de Hultén sur l’œuvre de Tinguely. Pour ce faire, il s’appuie en grande partie sur la découverte de carnets et notes inédites datant des années 1950, conservées dans les archives Pontus Hultén au Moderna Museet de Stockholm [fig. 2.1-2.3] .
Fig. 1 Pontus Hultén et Jean Tinguely, 1960
Fig. 2.1 – 2.3 Extraits des carnets de Pontus Hultén, n.d., Egna verk, 28 PHA, Moderna Museet
ACHTUNG 3 Bilder
Fig. 3 Citation tirée de de l’édition suédoise de l’Homme révolté d’Albert Camus dans un carnet de Pontus Hultén, n.d., Egna verk, 27 PHA, Moderna Museet
Influence des débats intellectuels de l’époque : le cas de l’Homme révolté d’Albert Camus
L’un des carnets de jeunesse de Pontus Hultén conservé dans les archives du Moderna Museet s’avère particulièrement éclairant pour saisir sa méthode de travail intellectuel9. Au-delà d’une érudition tournée vers l’histoire de l’art, certains titres mentionnés permettent de cerner l’impact du contexte culturel et des débats philosophiques de l’époque. Parmi ceux-ci, une citation manuscrite se détache avec une intensité particulière [fig. 3] : « Camus Människans revolt, kap Nihilism & historia, p. 133. Från att ha uppträtt om skaparens virvel har man konsekvent förts till att omforma skapelsen på eget bevåg. » Il s’agit là d’un extrait de la première traduction suédoise de l’Homme révolté d’Albert Camus (1913-1960), parue en 195310.
Publié en 1951, l’Homme révolté est un panorama philosophique, historique et politique qui interroge la révolte, le nihilisme, la révolution et la liberté11. Au cœur de la pensée camusienne se joue la différence entre révolte et révolution. Alors que la révolte est éthique, immédiate et limitée, la révolution est politique et totalisante. C’est cette dérive vers l’absolu, vers la terreur d’État, que Camus dénonce ouvertement dans son livre. En faisant du pouvoir absolu l’instrument d’une fin mythifiée, la révolution léniniste incarne cette perversion. Comme alternative, Camus appelle de ses vœux une « pensée du midi », qui puise à des sources dans l’anarchisme et à l’esprit de révolte libertaire12. L’auteur, qui s’était rapproché des milieux anarcho-syndicalistes dès 1947, admirait leur rejet du pouvoir centralisé et leur goût pour l’autogestion13. Il défend un « socialisme libertaire » qui tendrait un pont entre la liberté individuelle et la justice sociale14. Pour lui, la révolte constitue une solidarité humaine, qu’il résume ainsi dans sa célèbre phrase :
Je me révolte donc nous sommes15.
En pleine Guerre froide, cette dissidence critique vis-àvis du communisme soviétique a été vécue comme un crime impardonnable de lèse-marxisme. Pourtant, loin d’être isolé dans l’opinion publique, l’Homme révolté a trouvé un écho puissant auprès d’une jeunesse avide de nouveaux repères, parmi laquelle figuraient Pontus Hultén et Jean Tinguely.
Trouvant dans l’anarchisme une alternative au marxisme dogmatique, l’artiste suisse Jean Tinguely a sans doute été sensible à la posture de résistance d’Albert Camus face aux dérives autoritaires du stalinisme16. Il n’est probablement pas resté insensible non plus au passé de résistant de l’écrivain français engagé contre le nazisme durant l’occupation — une trajectoire qui faisait écho à un épisode formateur de sa propre jeunesse : à quatorze ans, Tinguely a tenté de rejoindre la résistance albanaise contre l’invasion fasciste italienne, avant d’être arrêté à la frontière suisse17. Sa sensibilité libertaire s’enracine durant les années de guerre, nourrie par une fréquentation assidue de la littérature anarchiste. C’est notamment à travers sa relation avec l’historien et militant libertaire Heinrich Koechlin (1918-1996) qu’il Fig. 3 Citation tirée de de l’édition suédoise de l’Homme révolté d’Albert Camus dans un carnet de Pontus Hultén, n.d., Egna verk, 27 PHA, Moderna Museet 4/13 acquiert une culture politique solide18. En 1950, Koechlin fonde la maison d’édition Don Quichotte à Bâle, à laquelle Tinguely participe activement en concevant le logo19. L’un des premiers ouvrages publiés est la thèse de Koechlin sur la Commune de Paris, saluée à sa sortie par Albert Camus20.
Revenant à l’extrait de l’Homme révolté recopié dans le carnet de Hultén, on reconnaît une citation extraite du chapitre intitulé « Nihilisme et histoire », qui clôt la deuxième partie de l’ouvrage consacrée à la « Rébellion métaphysique21 ». Camus y interroge la révolte dirigée non plus seulement contre l’ordre politique ou social, mais contre l’ordre ontologique lui-même, en déployant une généalogie philosophique du nihilisme. La figure du philosophe allemand Max Stirner (1806- 1856), admirée par Tinguely et Hultén, y occupe une place importante22. Cette révolte métaphysique, telle que la reconstitue Camus, est le mouvement par lequel l’homme, confronté à l’absurde d’un monde privé de sens, oppose à sa condition un non catégorique. Mais c’est précisément dans ce chapitre qu’il identifie le point critique où cette révolte, poussée à son paroxysme, se compromet — lorsqu’elle glisse de la négation à la volonté de substitution, et de la contestation de l’ordre divin à une entreprise de re-création absolue, potentiellement destructrice :
Cent cinquante ans de révolte métaphysique et de nihilisme ont vu revenir avec obstination, sous des masques différents, le même visage ravagé, celui de la protestation humaine. Tous, dressés contre la condition et son créateur, ont affirmé la solitude de la créature, le néant de toute morale. Mais tous, dans le même temps, ont cherché à construire un royaume purement terrestre où régnerait la règle de leur choix. Rivaux du Créateur, ils ont été conduits logiquement à refaire la création à leur compte. Ceux qui, pour le monde qu’ils venaient de créer, ont refusé tout autre règle que celle du désir et de la puissance, ont couru au suicide ou à la folie, et chanté l’apocalypse23.
Ce passage met en lumière l’un des enjeux centraux de la pensée camusienne : le lien intime entre la révolte de l’homme et l’acte de création, pensé en miroir de l’œuvre du Créateur divin. À travers cette analogie, il souligne que la révolte ne se contente pas de rejeter l’ordre établi ou la condition imposée : elle porte en elle une volonté de refonte, une pulsion transformatrice qui vise à réinventer le réel selon ses propres lois. Mais Camus en dévoile aussi l’impasse : lorsque la révolte perd le sens de la mesure, elle franchit un seuil où le geste créateur bascule dans la négation — non plus affirmation de l’homme face à l’absurde, mais destruction du monde au nom d’un absolu sans transcendance.
Il est particulièrement éclairant de mettre en évidence l’écho que trouve cette dialectique camusienne dans le texte « MOUVEMENT – TEMPS ou les quatre dimensions de la PLASTIQUE CINÉTIQUE » [fig. 4], rédigé par Pontus Hultén pour le catalogue-dépliant de l’exposition Le Mouvement présentée à la galerie Denise René en 195524 :
C’est un art moral, et même si c’est là une morale anarchique et uniquement subjective, elle englobe tous les problèmes qu’implique une position morale. L’artiste constructeur affirme, sans autre appui que celui qu’il trouve en lui, cette opinion morale que la sincérité personnelle consciemment réfléchie a une valeur propre en tant que force constructive. Mais lorsque le seul système admis est l’absence de tout système, peut-on dire grand-chose sans se contredire ? [...] Lorsque la tâche de l’artiste cesse d’être explicative, au sein d’un système établi, la vision statique de l’image se trouve nécessairement en recul [...]. Il est peut-être plus solitaire qu’avant, mais, à la fois Adam ou Dieu, ses ressources sont illimitées. Lorsqu’il veut se réaliser dans son art, pourquoi lui faudrait-il restreindre la richesse merveilleuse de ses possibilités ? [...] Ces symboles de sa liberté doivent être plus libres encore qu’il n’a la force de l’être lui-même25.
Fig. 4 Pontus Hultén, « MOUVEMENT – TEMPS ou les quatre dimensions de la PLASTIQUE CINÉTIQUE », Le Mouvement, Galerie Denise René, Paris, 1955
À l’instar d’Albert Camus, Pontus Hultén conçoit l’acte créateur comme un espace de tension qui dépasse les enjeux purement visuels pour entrer dans le domaine de la réflexion éthique. Cette position se cristallise dans une conception de l’artiste comme instance générative, affranchie de toute norme ou système préalable. En assumant la pleine responsabilité de son autonomie, en s’enracinant dans ce qui fait de lui un sujet singulier, l’artiste accède à une posture inédite, qui oscille entre la puissance démiurgique du Créateur et la nudité inaugurale du premier homme à l’aube d’un temps zéro.
À cette période, Pontus Hultén analyse la scène picturale des années 1950 à travers une « tension entre intentionnalité et spontanéité26 » qui scinde le champ artistique entre une abstraction lyrique « chaude » et une abstraction géométrique « froide ». Cette opposition formelle n’est cependant que le symptôme d’un blocage plus profond. Hultén diagnostique une situation critique de l’art moderne, une forme de paralysie interne née d’interrogations d’ordre éthique portant sur la place et la responsabilité de l’individu — des enjeux qui trouvent un écho évident dans les débats intellectuels contemporains, en particulier chez Albert Camus. Pour Hultén, la problématique artistique rejoint ainsi les dilemmes propres à la pensée anarchiste vers une interrogation éthique sur les conditions d’une liberté véritable27. Hultén propose une voie de dépassement. Cette dernière repose sur une double exigence : l’adoption d’une posture radicalement avant-gardiste de la part de l’artiste, et la transgression des limites statiques de l’œuvre d’art elle-même :
Le nouvel art est un exercice préparatoire. Il est une tentative de donner à l’individu une partie de la dignité, c’est-à-dire la possibilité de façonner lui-même son existence, qui aurait dû être sienne. C’est une liberté par procuration [...]. L’art est en train de devenir actif et dynamique. Il abandonne les anciennes formes associées à une vision statique du monde et à une société en quête de stabilité. L’art moderne est en train d’entrer dans un monde qui lui est propre. L’artiste est un homme libre. Aussi libre qu’un voleur dans la forêt28.
L’acte de créer devient alors, pour l’artiste, un geste de positionnement, une affirmation existentielle et singulière. Jean Tinguely, par son parcours et ses choix, incarne de manière exemplaire cet engagement.
Fig. 7 Jean Tinguely, Maya—Glückwünsche—Felicitation, Februar 1976, watercolour, pencil, felt-tip pen, ballpoint pen, stamps and collage on paper, folded once, 28.5 × 39 cm, Archive Museum Tinguely, inv. no. 003486
Les « bandits tragiques » ou l’écriture d’une histoire de l’âge d’or de l’anarchisme
Si la perspective libertaire de Pontus Hultén puise dans les débats intellectuels de son temps, elle s’articule également à une approche historiographique caractéristique des années 1950. Formé à l’histoire de l’art, le commissaire suédois excelle dans l’art de construire des récits, mobilisant aussi bien des sources primaires que les travaux universitaires contemporains29. Son intérêt pour l’histoire de l’anarchisme s’inscrit dans ce même geste, au point qu’il s’y essaiera lui-même par l’écriture. En 1958, Pontus Hultén consacre dans les pages du quotidien suédois Dagens Nyheter un article à la figure de l’anarchiste illégaliste français Marius Jacob (1879-1954), dont il retrace la trajectoire [fig. 5]30.
Dans la France de la Belle Époque, l’anarchisme connaît une radicalisation marquée, caractérisée par la montée d’une action libertaire aux accents extrémistes. Nourri des théories individualistes héritées de Max Stirner et relayées par l’hebdomadaire L’Anarchie, fondé en 1905 par Albert Libertad (1875-1908), un anarchisme d’« action directe » se structure progressivement31. Ce courant, farouchement anti-autoritaire, revendique l’insurrection comme unique voie possible pour renverser l’ordre établi, et légitime des formes de lutte violente — sabotage, vandalisme, voire attaque armée — au nom de la nécessité révolutionnaire32. C’est dans ce contexte qu’émerge la pratique illégaliste, adoptée par certains compagnons désireux de s’affranchir des conditions de vie ouvrière oppressantes.
À travers une analyse précise, Hultén présente Marius Jacob comme « l’un des hommes les plus remarquables du mouvement ouvrier révolutionnaire », dont les actes ne relèvent pas de la simple criminalité, mais d’une révolte idéologique contre le pouvoir et la propriété. Héritier de l’anarchisme post-communard, Jacob fonde une organisation clandestine d’une efficacité redoutable : Les Travailleurs de la nuit. Cette bande, composée d’éclaireurs, de cambrioleurs, de recéleurs et de revendeurs, opère selon une éthique stricte : elle ne s’en prend qu’aux représentants de ce qu’elle considère comme les « parasites sociaux33 » — patrons, magistrats, militaires — et s’interdit toute effusion de sang34. Jacob laisse sur les lieux de ses forfaits de courts billets signés « Attila » et reverse une partie du butin à la cause anarchiste. Lors de son procès retentissant à Amiens, en mars 1905, il prononce une déclaration intitulée Pourquoi j’ai volé, qui sera largement diffusée dans les milieux libertaires : « Ce discours est l’un des écrits les plus corrupteurs sur le sort des exploités que l’on puisse lire. » On y retrouve les principes fondamentaux de l’anarchisme individualiste :
Tout homme a droit au banquet de la vie […]. Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend. Je me livre au vol sans aucun scrupule. Je n’accepte pas notre prétendue morale qui prône le respect de la propriété comme une vertu alors qu’il n’y a pire voleurs que les propriétaires. Estimez-vous heureux que ce préjugé ait pris racine dans le peuple. Mais prenez garde, tout n’a qu’un temps35.
L’article de Pontus Hultén consacré à Marius Jacob témoigne d’un moment charnière dans l’historiographie de l’anarchisme. Dans les années 1950, un renouveau d’intérêt pour ce courant politique traverse les milieux intellectuels et universitaires français, avec une attention particulière portée aux figures de l’anarchisme illégaliste36. Hultén souligne, dans ce contexte, une lacune documentaire qui commence à être comblée à la même époque grâce aux travaux de Jean Maitron (1910- 1987), pionnier de l’histoire du mouvement ouvrier et de l’anarchisme en France37. La contribution décisive de Jean Maitron au développement de l’historiographie anarchiste se manifeste avec éclat dans son ouvrage Histoire du Mouvement Anarchiste en France (1951)38.
Fig. 5 Pontus Hultén, « Nattens arbetare – Marius Jacob », Dagens Nyheter, 28 juin 1958, p. 4
Fig. 6 Lettre de Jean Maitron à Pontus Hultén, 26 avril 1958, Diverse Korrespondens, LKO-MATE, PHA, Moderna Museet
Ce travail marque une étape essentielle dans la structuration d’un récit plus rigoureux et méthodique de l’anarchisme, s’affranchissant d’une lecture exclusivement idéologique ou mythifiée.
Pour rédiger son article, Pontus Hultén a pris contact avec Jean Maitron en avril de cette même année, espérant obtenir des informations complémentaires sur les dernières années de la vie de Marius Jacob. Dans sa lettre de réponse, Maitron décline poliment la demande, expliquant qu’il ne dispose d’aucun élément nouveau sur cette période [fig. 6]39. Néanmoins, il choisit de citer un passage de son propre ouvrage40, que Hultén intégrera dans la conclusion de son article, sous une forme légèrement reformulée : « Sans désespoir, avec le sourire aux lèvres, le cœur en paix... pour froncer le nez aux infirmités qui guettent la vieillesse41. » Ce geste témoigne d’une reconnaissance implicite de l’autorité scientifique de Maitron et de la volonté de Hultén de s’inscrire dans la continuité d’un travail historiographique en construction.
Gare au rififi : l’anarchisme dans la culture populaire parisienne des années 1950
L’article de Pontus Hultén met en lumière un autre aspect central de la présence de l’anarchisme dans le champ artistique des années 1950 en France, en particulier à travers la culture populaire de l’époque, où il se diffuse par le biais d’œuvres accessibles au grand public et rencontre un large succès.
Il souligne que l’impressionnant cambriolage perpétré par Marius Jacob et sa bande dans une bijouterie a été méthodiquement reproduit par le réalisateur américain Jules Dassin (1911-2008) dans son film Du rififi chez les hommes (1955). « Le casse décrit dans le film Rififi, où des voleurs pénètrent dans une bijouterie par le toit, est directement copié sur le dernier grand vol de Jacob42. » Réalisé après son exil forcé, cette œuvre est le premier film que Dassin tourne en France après avoir fui le maccarthysme43. Inscrit sur la liste noire hollywoodienne en raison de son engagement communiste dès les années 1930, Dassin avait vu sa carrière brutalement interrompue aux États-Unis44. La célèbre séquence du cambriolage, filmée sans un seul mot pendant près de vingt minutes, reprend fidèlement la technique du « coup du parapluie » inventée par Jacob. Couronnée du Prix de la mise en scène au Festival de Cannes 1955, cette scène a largement contribué au succès du film et relancé la carrière de Dassin. Par ce biais, l’illégalisme anarchiste se trouve relayé dans l’imaginaire collectif sous une forme esthétique, participant à une mémoire populaire indirecte mais persistante.
Durant cette période, l’infusion d’idées libertaires dans la culture populaire française se manifeste également dans un autre secteur majeur de l’industrie culturelle : la musique. Plusieurs pages des carnets de jeunesse de Pontus Hultén révèlent son admiration pour deux figures emblématiques de la chanson française, Georges Brassens (1921-1981) et Léo Ferré (1916-1993), qui affichaient alors ouvertement leurs affinités avec l’anarchisme [fig. 7]45.
À la fin des années 1940, avant de connaître le succès, Georges Brassens et Léo Ferré étaient profondément enracinés dans le milieu libertaire parisien. Brassens, avec sa plume mordante et ses nombreux pseudonymes, collaborait au journal Le Libertaire, où il publiait des textes empreints d’anticléricalisme, d’antimilitarisme et de critiques virulentes du système judiciaire46. Cette veine contestataire irrigue ses chansons des années 1950 où l’humour sert une remise en question radicale de l’autorité et des normes sociales. Comme l’évoque AnnMarie Perl dans sa présentation, Jean Tinguely fréquentait à cette époque le Théâtre des Trois Baudets, dirigé par Jacques Canetti (1909-1997), où Brassens se produisait régulièrement47.
Léo Ferré, quant à lui, puise une grande part de son engagement dans les récits de lutte des exilés espagnols qu’il côtoie48. Son œuvre, profondément marquée par la poésie et l’insoumission, s’affirme avec force dès 1954, notamment à travers le Piano du pauvre et l’Homme, qui le consacrent comme une figure majeure de la chanson libertaire, à la fois lyrique et frondeuse.
Anne Steiner souligne qu’une filiation évidente unit les libertaires individualistes du début du XXe siècle et ces deux musiciens, incarnant ainsi la permanence d’un esprit contestataire dans la culture française49.
Fig. 7 Extraits des carnets de Pontus Hultén, n.d., Egna verk, 28 PHA, Moderna Museet
Un jour en ville pour tout exploser – mise en action des principes anarchistes dans l’art
À partir de ses réflexions sur l’art contemporain en général, et plus spécifiquement sur l’œuvre de son ami Jean Tinguely, Pontus Hultén élabore progressivement une analogie profonde entre les processus de création artistique et l’imaginaire anarchiste. En septembre 1955, il invite Tinguely à Stockholm afin de prolonger leurs échanges et expérimentations communes. Ce séjour marque un tournant : il donne lieu à une série d’objets critiques et artistiques qui témoignent d’un véritable passage à l’acte.
Le 8 octobre 1955, Hultén inaugure une exposition personnelle de Tinguely à la galerie Samlaren50. À cette occasion, Hultén publie dans la revue Kasark51 un essai programmatique intitulé « Den ställföreträdande friheten, eller om rörelse i konsten och Tinguely metamekanik » (La liberté substitutive ou le mouvement en art, et la méta-mécanique de Tinguely)52. Pour la première fois, Hultén associe explicitement la démarche de Tinguely à une forme d’« antisocialité » créative53.
Le Suédois établit une analogie saisissante entre l’attitude de l’artiste au moment ultime de la création et celle du militant libertaire à l’instant décisif où il s’apprête à commettre un acte contre la société. Tous deux, selon lui, se trouvent placés dans une situation d’absolue nécessité : celle de poser un geste destructeur afin de manifester leur opposition radicale au système, et d’affirmer le « droit de chacun de dire “non”54 ». L’acte artistique devient ainsi, dans la pensée de Hultén, l’équivalent exact d’un attentat : un « fragment de révolte55 ». À tel point que, selon ses propres termes, un artiste comme Jean Tinguely aurait longtemps hésité entre la bombe et la peinture :
L’artiste, influencé par les dadaïstes et Marcel Duchamp, prétend avoir été longtemps obsédé par l’envie de jeter une bombe sur la Joconde. S’il n’a pas commis cet attentat préparé minutieusement, c’est en raison de la condamnation et de l’emprisonnement qu’il supposait ! Mais Duchamp n’avait-il pas anticipé sur ce geste, lorsqu’en 1919 il ajouta, sur une reproduction de la célèbre Joconde, une barbiche, des moustaches et une légende irrévérencieuse ? Un attentat plus spirituel s’il en est !56
Dans l’imaginaire littéraire et populaire, l’anarchisme est souvent associé à la figure du terroriste de la fin du XIXe siècle, auréolée d’un halo dramatique et sensationnaliste, empreint de « sang et d’anecdote », propre à flatter les goûts du grand public57. Albert Camus fut l’un des premiers intellectuels à interroger en profondeur la pratique du terrorisme, notamment dans le contexte russe58. En 1949, l’écrivain s’était déjà emparé de l’épisode historique de l’attentat contre le grand-duc Serge pour écrire Les Justes, pièce de théâtre qui remporta un vif succès politique et critique59. Ce rapprochement entre l’artiste et le terroriste, tel que formulé par Hultén, s’inscrit donc dans une tradition d’admiration profondément camusienne pour le mythe du poseur de bombe russe : « Pas plus que les attentats commis par les anarchistes russes du XIXe siècle, ces révoltes, prises isolément, ne peuvent changer le cours des sociétés, mais le nombre de symboles, témoignant du droit de chacun de dire “non” spontanément, s’avère impressionnant60. »
Du discours à l’acte, il n’y a qu’un pas pour Jean Tinguely et Pontus Hultén, qui concrétisent leur ambition commune durant le périple suédois. En effet, cette même année, Hultén coréalise avec Hans Nordenström (1927-2004) le film expérimental En dag i staden (Une journée en ville)61. Ce moyen-métrage met en scène la course effrénée et absurde d’un homme mystérieux, engagé dans une tentative terroriste de faire exploser les lieux symboliques du pouvoir à Stockholm : l’Église, le Palais royal, le Nationalmuseum. Jean Tinguely participe activement au projet, aux côtés des artistes suédois Per Olof Ultvedt (1927-2006) et Oscar Reutersvärd (1915-2002), en endossant les rôles d’un policier qui tente de poursuivre le poseur de bombe avant de se faire assassiner de manière grotesque.
Comme l’explique John Sundholm, le film constitue un véritable « collage anarchique » dirigé contre une société suédoise perçue alors comme trop rigide et conservatrice62. Ce « collage » s’incarne aussi formellement dans la structure visuelle éclatée parfois chaotique du film, entre poursuites, explosions et scènes de destruction d’instruments de musiques ; il est réalisé à partir d’un enchaînement de séquences hétéroclites mêlant humour et absurdité. Cette violence symbolique dépasse le simple effet de style : elle s’incarne dans des procédés concrets de destruction — démolition, détournement, sabotage — que les artistes investissent en tant que moteurs d’invention.
Ainsi, le caractère « anarchiste » revendiqué des actions artistiques menées par le duo d’amis Jean Tinguely et Pontus Hultén s’éclaire pleinement dans son inscription aux contextes culturels de l’Europe du début de la Guerre froide. Cette époque particulière, empreinte de violents débats idéologiques et de rivalités intellectuelles entre les deux grandes puissances, est aussi celle d’un réveil de l’action libertaire dans les domaines de la réflexion intellectuelle, de la culture et de la création artistique comme une « troisième voie ». Au croisement de l’histoire de la mémoire libertaire, de la culture populaire et de la pratique artistique d’avant-garde, les deux hommes forgent une nouvelle esthétique anarchiste qui questionne l’imbrication entre création et destruction, art et politique, affirmant la puissance d’une révolte esthétique toujours en mouvement.
- Pontus Hultén, Jean Tinguely « Méta », Paris, Pierre Horay Éditeur, 1973, p. 16
- Laurence Bertrand Dorléac, L’Ordre sauvage – Violence, dépense et sacré dans l’art des années 1950-1960, Paris, Gallimard, 2004, p. 239
- Pontus Hultén, « Den ställföreträdande friheten, eller om rörelse i konsten och Tinguely metamekanik », in Kasark, n° 2, 1955, n. p. ; Pontus Hultén, 9 peintures de Tinguely, Paris, Édouard Loeb / Galerie Denise René, 1957, n. p. ; Pontus Hultén, Rörelse i konsten, Stockholm, Moderna Museet, 1961 ; Pontus Hultén, Tinguely : META, Paris, Galerie Alexandre Iolas, 1965, n. p. ; Pontus Hultén, « Jean Tinguely », in Sam Hunter (dir.), Nicolas Schöffer and Jean Tinguely – 2 Kinetic Sculptors, New York, The Jewish Museum, 1965, p. 12-15 ; Pontus Hultén, « Jean Tinguely », in The Machines: As Seen at the End of Mechanical Age, New York, Publisher Museum of Modern Art, New York, 1968, p. 165-174 ; Pontus Hultén, op. cit. note 1 ; Pontus Hultén, Jean Tinguely – Une magie plus forte que la mort, Paris, Le Chemin Vert, 1987 ; Jean-Hubert Martin (dir.), Tinguely, Turin, Cataloga / Paris, Centre George Pompidou, 1988, p. 11-13
- Gaetano Manfredonia, L’anarchisme en Europe, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 2001, p. 111-112
- Anders Frenander, Debattens vågor: Om politisk-ideologiska frågor i efterkrigstidens svenska kulturdebatt, Göteborg, Göteborg universite, Institutionen för idé- och lärdomshistoria, coll. Arachne, 1999
- Jacopo Galimberti, Individuals against Individualism: Art Collectives in Western Europe (1956-1969), Liverpool, Liverpool University Press, 2017, p. 24-26
- Gaetano Manfredonia, op. cit. note 4, p. 112
- Patrik Lars Andersson, Euro-pop: The Mechanical Bride Stripped Bare in Stockholm, Even, thèse de doctorat, University of British Columbia, 2001, p. 36-61 ; Laurence Bertrand Dorléac, op. cit. note 2, p. 237-251 ; Andreas Gedin, Pontus Hultén, She, a Cathedral & Moderna Museet, Londres, Koenig Books, 2020, p. 134-137
- Egna verk, 27 Pontus Hultén Archives, Moderna Museet
- « Camus, l’Homme révolté, chap. Nihilisme et histoire, p. 133. L’homme, lui-même apparu dans le tourbillon de la création, en est venu progressivement à transformer la création de son propre fait. » Albert Camus, Människans revolt, trad. Gunnar Brandell, Stockholm, Bonniers, 1953
- Albert Camus, l’Homme révolté, Paris, Gallimard, 1951. Pour une présentation détaillée de l’ouvrage, voir François Dosse, La saga des intellectuels français. I. À l’épreuve de l’histoire, 1944-1968, Paris, Gallimard, coll. folio histoire, 2018, p. 130-134 et Jeanyves Guérin, in Voies et voix de ma révolte chez Albert Camus, Paris, Honoré Champion, p. 134-138
- Albert Camus, op. cit. note 11, p. 313-384
- Jeanyves Guérin, op. cit. note 11, p. 24-25
- Ibid., p. 136
- Albert Camus, op. cit. note 11, p. 12
- Pontus Hultén, Jean Tinguely : « Méta », op. cit. note 3, p. 6-7
- Pontus Hultén, Jean Tinguely – Une magie plus forte que la mort, op. cit. note 3, p. 13
- Marianne Enckell, « Koechlin, Heinrich Eduard “Heiner” », Dictionnaire des anarchistes, site Le Maitron, version mise en ligne le 23 juin 2019, URL : https://maitron.fr/koechlin-heinrich-eduard-heiner-dictionnaire-des-anarchistes/ (consulté le 19 juin 2025)
- Patrik Lars Andersson, op. cit. note 8, p. 47
- Heinrich Koechlin, Die Pariser Commune von 1871 im Bewusstsein ihrer Anhänger : Studien über Wirksamkeit und Wandlungen der revolutionären Idee unter besonderer Berücksichtigung der Spannungen zwischen Freiheit und Autorität ; auf Grund von in der Schweiz befindlichen Quellen, Bâle, Don‑Quichotte‑Verlag, 1950
- Albert Camus, op. cit. note 11, p. 78-167
- Patrik Lars Andersson, op. cit. note 8, p. 47-56
- Albert Camus, op. cit. note 11, p. 361. Le passage souligné est la version originale de l’extrait recopié par Hultén dans son carnet
- Edling, Marta, « From Margin to Margin? The Stockholm Paris Axis 1944-1953 » [en ligne], Konsthistorisk Tidskrift/Journal of Art History, n° 88, 2019, p. 1-6
- Pontus Hultén, « MOUVEMENT – TEMPS ou les quatre dimensions de la PLASTIQUE CINÉTIQUE », Le Mouvement, Paris, Galerie Denise René, 1955, n. p.
- Pontus Hultén, « Den moderna konsten » (traduction de l’auteur), Dagens Nyheter, 9 septembre 1958
- « [L]a question de la morale anarchiste, la question de savoir si l’individu, une fois libéré de toute contrainte extérieure, agira conformément au bien commun ou si toute spéculation sur la morale est inutile et qu’il faut se contenter d’espérer que l’absence de pouvoir et de contrainte offrira des possibilités infinies à tous. » Ibid.
- Ibid.
- Eva-Lena Bergström, Utan konst kan jag inte leva. Om Agnes Widlund och konstsallongen Samlaren, Stockholm, Appell Förlag, 2023, p. 68-78
- Pontus Hultén, « Nattens arbetare –Marius Jacob », Dagens Nyheter, 28 juin 1958, p. 4
- Gaetano Manfredonia, op. cit. note 4, p. 63
- Anne Steiner, Les En-dehors – anarchistes individualistes et illégalistes à la « Belle époque », Paris, L’échappée, coll. Le feu de l’action, 2019 (2008), p. 13
- Pontus Hultén, op. cit. note 30
- Ibid.
- Citée dans Anne Steiner, op. cit. note 32, p. 52-54
- Jean Maitron, « État des travaux : L’anarchisme français, 1945-1965 », Le Mouvement social, n° 50, janvier-mars 1965, p. 97-110
- Claude Pennetier , « Maitron Jean », Le Maitron, 23 octobre 2019, https://maitron
- Jean Maitron, Histoire du mouvement anarchiste en France (1880-1914), Paris, Gallimard, 1951
- Lettre de Jean Maitron à Pontus Hultén, 26 avril 1958, Diverse Korrespondens, LKO-MATE, PHA, Moderna Museet
- « Ainsi que je l’ai noté dans la seconde édition de ma thèse, Jacob s’est suicidé le 18 août 1954 “faisant la nique à toutes les infirmités qui guettent la vieillesse”. » Ibid.
- Pontus Hultén, op. cit. note 30
- Ibid.
- Jules Dassin (réal.), Du rififi chez les hommes, film, France, Pathé Consortium Cinéma, 1955, 1h58. Scénario de Jules Dassin, d’après le roman d’Auguste Le Breton, avec Jean Servais, Carl Möhner, Robert Manuel, Jules Dassin
- Jean‑Luc Douin, « Jules Dassin, cinéaste américain », Le Monde, 1er avril 2008 (consulté en ligne le 1er juin 2025)
- Egna verk, 28 Pontus Hultén Archives, Moderna Museet
- Georges Brassens, Œuvres complètes : chansons, poèmes, romans, préfaces, écrits libertaires, correspondance, Paris, Le Cherche midi, 2007, p. 1033-1077
- AnnMarie Perl, « Spectacle empirique: Tinguely the Painter, in Three Acts », in Tinguely Studies (à paraître), 2025
- Gilles Côté, « Léo Ferré ou le mal à l’âme d’un anarchiste », in Nuit blanche, n° 67, été 1997, p. 30-31
- Anne Steiner in « L’anarchisme, 2/4 : les individualistes » [émission radiophonique], La Fabrique de l’Histoire, animée par Emmanuel Laurentin, France Culture, 14 décembre 2016, durée : 58 min. https://www.radiofrance.fr/franceculture
- Eva-Lena Bergström, op. cit. note 29, p. 78-81
- Anders Karlin, « Kasark en liten tidskrift av oerhörd vikt », in OEI. The Magazine, n° 56-57, 2012, p. 145-178
- Pontus Hultén, « Den ställföreträdande friheten, eller om rörelse i konsten och Tinguely metamekanik », in Kasark, n° 2, 1955
- Ibid.
- Ibid.
- Ibid.
- Pontus Hultén, op. cit. note 3, p. 28
- Daniel Guérin, L’anarchisme, Paris, Gallimard, coll. Idée, 1976, p. 7
- Gilles Ferragu, Histoire du terrorisme, Paris, Édition Perrin, coll. Synthèses historiques, 2014, p. 94
- Albert Camus, Les Justes, Paris, Gallimard, coll. Blanche, 1950. La pièce fut créée le 15 décembre 1949 au Théâtre Hébertot à Paris, dans une mise en scène de Paul Œttly.
- Pontus Hultén, « Den ställföreträdandefriheten », op. cit. note 3 (nous soulignons)
- Pontus Hultén et Hans Nordenström (réal.), En dag i staden, film, 16 mm, noir et blanc, sonorisé, 19 min, Suède, 1955-1956
- Lars Gustaf Andersson, John Sumdholm et Astrid Söderbergh Widding, A History of Swedish Experimental Film Culture: From Early Animation to Video Art, Stockholm, National Library of Sweden, 2010, p. 87-91
Crédits photo :
Fig. 1 : Musée Tinguely, Bâle, photo : Christer Strömholm
Fig. 2.11–2.3, 3, 5, 6 et 7 : Moderna Museet, The Pontus Hultén Archive
Fig. 4 : Galerie Denise René, Paris
© 2025, Christer Strömholm / Strömholm Estate pour l’œuvre de Christer Strömholm
Pierre Ruault Sous la direction d’Antje Kramer-Mallordy, Pierre Ruault prépare à l’Université Rennes 2 un doctorat en histoire de l’art, consacré aux dynamiques transnationales entre les avant-gardes françaises et suédoises entre 1945 et 1968. Ses travaux analysent l’émergence d’une « troisième voie », pensée comme alternative aux modèles politiques et esthétiques dominants de l’après-guerre. Actuellement ATER au département d’histoire de l’art de l’Université Rennes 2, il codirige le master Métiers et arts de l’exposition et enseigne l’histoire de l’art contemporain. Parallèlement, il mène des activités de critique d’art et de commissariat d’exposition.
Cet article paraît à la suite au colloque « Jean Tinguely Revisited. Relectures critiques et nouvelles perspectives », du 20 au 22 mars 2025
Keywords
Anarchisme culturel
Révolte artistique
Tinguely–Hultén
Pensée libertaire
Avant-garde des années 1950
Tinguely Studies, novembre 2025
Revue scientifique en ligne
Éditée par le Musée Tinguely, Bâle
www.tinguely.ch
ISSN 3042-8858